Le Tarn au temps des Cathares : Un château oublié dans une vallée maudite, haut lieu de l’hérésie
Série (7/8). Entre les Cammazes et Durfort, les ruines de l’ancien château habité par les Cathares n’ont pendant longtemps intéressé personne. La légende désigne la vallée qui y conduit comme un lieu infernal, hanté par les diables et les revenants. La vallée de la fin du monde en quelque sorte où l’on découvre encore une arche et une ancienne tout. La tour du diable ou les décombres du château de Roquefort ? À vous de choisir.
C’est au Xe siècle que le château de Roquefort est construit, entre Les Cammazes et Durfort. Au XIIe siècle, il abrite des fervents partisans de l’hérésie. En effet, lors du développement du catharisme, la famille de Roquefort prend partie pour l’hérésie.
Jean Odol, (1927-2020) instituteur et ancien maire d’Ayguevives, passionné d’histoire, décrit ainsi le site : "Arriver à Roquefort est une gageure : pas de panneau fléché sur la route indiquant un monument intéressant voire historique, pas de sentier, et pour cause, pas de récupération commerciale. Nous sommes dans un massif de fougères qui sépare le château de Roquefort de la Montagne Noire, dans la vallée du Sor".
A lire aussi : Le Tarn au temps des Cathares : à Albi, une cathédrale au cœur du Pays Cathare
Le visiteur découvre devant lui une porte romane intacte. "En 1209, trois cents parfaits cathares s’y sont réfugiés. Roquefort est l'une des puissantes forteresses cathares de la Montagne Noire", ajoute cet érudit dans les Cahiers de l’Histoire édités par la Société d’histoire de Revel Saint Ferreol.
Le château n'a jamais été détruit
Ce château de Roquefort est le prototype même d'un castrum d'époque cathare. Pendant cette période, plusieurs grands seigneurs y vécurent. En 1209, l’armée de Simon de Montfort veut s’en emparer. Mais point d’assiégés puisque la forteresse est déserte.
Les habitants, qui connaissent la terrible réputation de Montfort, avaient déguerpi, en passant par la forêt, ou selon la légende, en empruntant un souterrain. "Ce qui fait que le château de Roquefort, contrairement à beaucoup d’autres (Montségur), n’a pas été détruit ou reconstruit et est encore aujourd’hui formé des mêmes pierres qu’à l’époque des Cathares !", assure Jean Odol.
A lire aussi : Le Tarn au temps des Cathares : pendant la Croisade contre les Albigeois, Cordes naît, magnifique et rebelle
En 1233, une assemblée cathare se tient dans cette citadelle. Les Roquefort et d’autres nobles locaux y entendent une prédication. Quelques années plus tard, les femmes du château de Roquefort empêchent l’abbé de Sorèze et ses hommes de procéder à une arrestation. Lorsque les persécutions contre les hérétiques s’intensifient, le château devient un relais pour les Cathares du Lauragais.
"Le ravin des criminels"
Il n’en fallait pas plus, pour que les on-dit et autres sornettes fassent de ce lieu et de cette vallée, un endroit peu fréquentable. Une ancienne cascade se trouvait au lieu-dit Malamort, où plus d’un avait perdu la vie et connu la "male mort", nous dit le docteur Clos au début du XIXe siècle : "C’est la chute d’eau la plus belle, la plus pittoresque qu’il y ait dans toute la contrée. Le bruit qui en résulte dans le vallon ne contribue pas peu à augmenter l’horreur qu’inspire ce lieu sauvage…"
Si l’on rajoute des lieux aux noms aussi poétiques que "le ravin des criminels" ou "combe des gos", l’imaginaire populaire s’est chargé d’en remettre une bonne couche dans le sordide. La vieille tour ruinée de Roquefort devient ainsi la tour du diable.
Le sorézien et académicien Jean Mistler (1897-1988) note dans ses souvenirs : "Le Bout du Monde, c’était la fin de l’univers connu, et la porte du monde féerique, des gazons de montagne qui sonnent creux sous les pas, des souterrains dont l’entrée est perdue, mais qui s’ouvrent avec leurs trésors la nuit de Noël, juste pendant que sonnent les douze coups de minuit".
La citadelle cathare inconnue se dévoile
Jacques Albarel, notre correspondant local a participé au début des années 1980 aux fouilles officielles du site de Roquefort. Il raconte : "Ces fouilles se poursuivent encore de nos jours avec Pierre Clément, auteur d'un ouvrage conséquent sur l'historique du château. Tous les objets trouvés pendant les quatre premières années se trouve actuellement à la mairie des Cammazes. Le résultat des fouilles, analysé à l'université de Bordeaux, a permis de retracer l'histoire de cette place forte décrite par Elie Griffe et Michel Roquebert comme « citadelle cathare inconnue."
Son ouvrage paru en 1981 lève le voile sur l'importance du lieu pendant la croisade, l'inquisition et la fuite des Parfaits vers la Lombardie. Ce château de Roquefort est à l'origine du village des Cammazes, appelé Roquefort lès Campmazès à son origine en 1384.
J'ai déjà un compte
Je me connecteVous souhaitez suivre ce fil de discussion ?
Suivre ce filSouhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?