EDITORIAL. Enlèvement d’enfant vers l’étranger : le fait accompli
« Mélangez-vous, mélangez-vous », chantait avec un solide optimisme l’ami Pierre Perret. Il est vrai que les mariages mixtes sont souvent de belles aventures humaines. Des rencontres originales ou exotiques, qui se sont transformées en amour. Avec à la clé, l’échange fécond du couple, l’élargissement des univers et la rencontre improbable de deux familles, parfois du bout du monde. Pour les enfants, ce sont deux cultures, deux langues, deux traditions, bagages magiques pour un monde plein de complexité…
Ça, c’est quand tout va bien. Mais le couple mixte, pour avoir souvent surmonté les préjugés et les réticences des proches, n’en est pas pour autant indestructible. Et au bout du compte, il se révèle encore plus fragile que les autres quand vient l’heure de la mésentente ou de la rupture. Surtout lorsqu’il y a des enfants. Si ces parents sont, malgré leurs désaccords, encore en mesure de gérer au mieux leur séparation dans l’intérêt de leur progéniture, tant mieux. Mais si ce n’est pas le cas, alors, l’un ou l’autre des ex va subir la double peine.
Car un divorce entre compatriotes, tout cataclysmique qu’il puisse être, va au final être résolu par les lois de la République. Qui, bon an, mal an, vont fixer les règles. Oh, certes, elles ne sont pas toujours respectées, par les uns ou par les autres, mais dans ce cas, il y a des voies de recours, et grosso modo, la justice fonctionne.
Mais lorsque les ex-conjoints sont de nationalités différentes, alors, chacun rentre dans son camp, et veut que ce soit les lois de son pays qui priment, notamment pour la garde des enfants. Et les législations sont très différentes d’un pays à l’autre. Par exemple, les règles dans certains Etats où la religion ou le patriarcat pèsent, sont en contradiction avec la loi française, qui applique le principe d’égalité homme-femme. Alors, chaque histoire devient du cas par cas, les magistrats s’opposent et se contredisent et en attendant, c’est souvent la loi du plus rapide, ou la loi du fait accompli qui prime. Enfin, celui qui est écarté ne voit plus ses enfants, n’a plus de nouvelles, se sent comme rayé de la carte parentale. Un déchirement.
Ce qui est tragique, c’est que, même lorsque des procédures internationales existent pour récupérer ou simplement voir ses enfants, elles sont infiniment complexes à appliquer. Cela prend des années de procédure, de tractations, qui souvent n’aboutissent à rien. Alors, les enfants grandissent, oublient celui qui est resté au loin de l’autre côté de la planète. Ou bien, à l’inverse, subissent, au terme d’une séparation mal vécue, un manque cruel du parent disparu. Inutile de dire que si tout cela est enrobé de mensonges et de rancœurs, alors, ces enfants mixtes, qui auraient pu être si doués seront pour toujours des gosses malheureux qui ne grandiront qu’à moitié.
J'ai déjà un compte
Je me connecteVous souhaitez suivre ce fil de discussion ?
Suivre ce filSouhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?