Les producteurs d’armagnac rencontrent le ministre du Commerce chinois après l’ouverture par Pékin d’une enquête antidumping sur les eaux-de-vie
L’interprofessionnel de l’Armagnac a rencontré le ministre du Commerce chinois il y a quelques jours. Les producteurs de l’eau-de-vie du sud-ouest sont inquiets suite à l’ouverture d’une enquête antidumping par Pékin sur les eaux-de-vie européennes.
Pour les producteurs d’Armagnac, le marché chinois est capital. Il s’agit du deuxième pays importateur de l’eau-de-vie du Sud-Ouest après le marché américain. Alors, lorsque la Chine a annoncé lancer une enquête antidumping sur les eaux-de-vie de vin européennes le 5 janvier dernier, certains ont pu sentir leurs genoux trembler.
Cette enquête a été diligentée à la demande de l’Association chinoise des alcools, a communiqué le gouvernement de la République populaire de Chine. Elle porterait sur des soupçons de dumping entre le 1er octobre 2022 et le 30 septembre 2023. Pour faire simple, les professionnels de l’alcool chinois et les autorités du pays reprochent aux producteurs français et européens de vendre leur alcool moins cher à l’étranger que dans leur pays d’origine. Faire ainsi du « dumping », sert à faire connaître ses produits sur un nouveau marché, à fragiliser économiquement la concurrence etc.
Cette enquête intervient également dans un contexte de tension entre le pays et l’Union européenne (UE). Face à la vive concurrence des véhicules électriques chinois sur le marché européen, l’UE avait annoncé, en septembre 2023, l’ouverture d’une enquête sur les subventions chinoises aux voitures électriques. Ainsi, certains pointent du doigt une enquête sur les eaux-de-vie européenne en réponse à cette enquête européenne. Et au milieu sont pris en étau les professionnels de l’Armagnac.
4 millions d’euros de chiffre d’affaires
Une enquête qui, à terme, pourrait faire du mal au marché de l’armagnac. C’est pour cette raison que le BNIA, bureau national interprofessionnel de l’Armagnac, accompagné de son homologue de Cognac, a profité de la visite du ministre du Commerce chinois Weng Wentao il y a quelques jours enFrance pour plaider sa cause.
« Cette enquête intervient dans un contexte de tensions commerciales et diplomatiques. Elle est dirigée contre les eaux-de-vie de vin européennes, mais 95 % des spiritueux européens importés en Chine sont Français, du Cognac et de l’Armagnac », explique Olivier Goujon, directeur du BNIA, et qui assistait à cette rencontre. Le directeur ne le cache pas, la Chine est un marché majeur, capital même. « Les Chinois sont connaisseurs de nos produits, nous avons des liens forts avec eux. Ce que l’on déplore, c’est que notre filière soit ainsi ciblée, prise dans une crise qui nous dépasse ».
Pas d’inquiétude cependant pour l’année en cours, l’enquête devrait prendre 12 à 18 mois. « Le marché est sécurisé pour 2024. Mais les choses pourraient changer l’année prochaine, avec des droits de douane prohibitifs, qui nous fermeraient ce marché », redoute Olivier Goujon. Mais on en est encore loin, souligne-t-il. « Après cette rencontre, nous restons sereins, des gages nous ont été donnés. Nous allons nous aussi continuer à interpeller nos dirigeants pour trouver une issue favorable ».
Pour l’Armagnac, qui compte 660 producteurs, une cinquantaine de maisons exportent vers la Chine, pour un chiffre d’affaires estimé à 4 millions d’euros.
S’ouvrir de nouveaux marchés
« Évidemment que le marché chinois est important, il y a beaucoup de maisons qui exportent là-bas. Cela peut nous porter préjudice », réagit à son tour Jérôme Delord, président du BNIA et producteur d’armagnac. Lui aussi exporte en Chine. « Si pour moi la Chine était un marché majeur, je serais inquiet. En tant que producteur, je ne suis pas le premier concerné, en tant que président de l’interprofessionnel, je suis le dossier de près ».
La maison Delord exporte dans 38 pays dans le monde. « Cette année, on exporte pour la première fois en Croatie, en Suède. Il faut constamment s’ouvrir de nouveaux marchés pour éviter ce type de situation ».
L’exemple de la Russie, où l’armagnac était présent, est marquant. Même s’il n’est pas totalement fermé, le marché n’est pas stable. Avec la Chine, en cas de conclusions négatives de l’enquête, les droits de douane pourraient exploser l’année prochaine et faire baisser drastiquement les ventes dans l’ex-Empire du Milieu.
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