REPORTAGE. "On vient ici tous les jours depuis qu’on est enfant…" Les plages de Barcelone et de la Costa Brava menacées par la montée des eaux
Comme une partie du littoral français, les côtes espagnoles sont menacées par la montée des eaux. La tempête Nelson qui s’est abattue sur la Catalogne pendant le week-end de Pâques a gravement endommagé les plages de la région la plus touristique d’Espagne.
Les vagues de plusieurs mètres de haut ont englouti le sable à tel point que des plages entières ont disparu, comme à Montgat, à 10 kilomètres au nord de Barcelone lors du passage de la tempête Nelson. Méconnaissable, le front de mer de cette cité catalane est désormais inaccessible au public. "C’est terminé ici la plage : quelle tristesse ! C’est surtout triste pour les gens comme nous. On vient tous les jours depuis qu’on est enfant. C’est dramatique", regrette Juan.
Assis sur un banc, devant un panneau informant que la plage est fermée, le retraité ne peut que constater les dégâts : "D’habitude chaque été ils installent ici des "chiringuitos", des guinguettes sur le sable. Cette saison il n’y en aura pas ".
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Le restaurant "Els Banys de Carmen", en bord de plage, qui propose chaque été des fruits de mer et des poissons grillés restera sans doute fermé. L’école de voile aussi aura du mal à résister : il n’y a plus d’espace pour entreposer les catamarans au bord de la mer. "On finira par devoir aller ailleurs parce qu’on aura plus de place sur le littoral", se désole Jordi, patron de l’école. "Ça va être de plus en plus difficile de proposer des cours de voiles en bord de mer par ici".
D’autres stations balnéaires ont fait les frais du passage de Nelson : la promenade de Sant Antoni de Canonge n’a pas résisté aux vagues tandis qu’une plage de Lloret de Mar a été emportée. À Barcelone, la plage a perdu la moitié de sa surface.
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"Un pansement sur une jambe de bois"
Ce n’est pas la première fois qu’une tempête emporte le sable mais ce coup de mer intervient au plus mauvais moment, alors que la saison touristique commence tout juste. Ce contretemps s’ajoute à la sécheresse historique que vit la Catalogne qui pourrait empêcher les hôtels et les campings de remplir leurs piscines cet été.
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Le maire de Barcelone Jaume Collboni a appelé Madrid à l’aide et a demandé au gouvernement Sanchez un soutien financier pour remettre en état les plages d’ici le mois de juin. Les autorités apporteront certainement du sable mais cela ne changera pas fondamentalement les choses. "C’est un pansement sur une jambe de bois. Ça donnera l’impression qu’il n’y a pas de problème. Mais le sable repartira dès la première tempête venue", réagit un brin désabusé Bernat, habitant de Montgat.
"Un tsunami au ralenti"
"On voit bien que l’eau grignote toujours plus le littoral. Ils devraient construire une immense digue verticale à quelques mètres de la plage. Comme ça, pendant les tempêtes, les vagues se briseront sur la digue et n’emporteront pas avec elles tout le sable. En France et dans le sud de l’Espagne, ils en ont installé et ça fonctionne bien".
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À cause du réchauffement climatique, le niveau de la mer monte de 4 millimètres par an. "4 millimètres, c’est énorme. Et ça s’accélère : ce sera bientôt un centimètre chaque année. Ça ne va pas en s’arrangeant, analyse Carles Ibañez, chercheur et directeur du laboratoire Eurecat. Je compare cette montée des eaux à un tsunami au ralenti".
D’ici 2040, 45 % des plages du littoral catalan ne seront plus suffisamment grandes pour accueillir des activités et donc des touristes. "Cette montée des eaux est aussi un immense problème économique dans une région qui vit en partie du tourisme", poursuit Carles Ibañez. Les plages ne sont pas les seules menacées : 60 % du littoral catalan est construit. Des immeubles en bord de mer seront bientôt inhabitables. La ligne de chemin de fer qui longe le littoral depuis Barcelone en direction du nord devra sans doute être déplacée de plusieurs kilomètres à l’intérieur des terres.
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