Alzheimer : les exercices physiques et cognitifs agissent-ils vraiment sur la maladie ?
Une équipe toulousaine, spécialisée dans le vieillissement, s'est intéressée aux effets des programmes de nutrition, d'exercices physiques et intellectuels sur la maladie d'Alzheimer. En observant les biomarqueurs sanguins, la recherche entre dans une nouvelle ère.
La maladie d'Alzheimer ne dispose toujours pas de traitement pouvant la guérir, stopper sa progression ou la prévenir. Selon les dernières estimations, plus d'un million de personnes en sont atteintes en France. Mais les lignes bougent dans la recherche après de longues années de stagnation. Aux Etats-Unis, de nouvelles molécules sont proposées depuis plusieurs mois. Mais ces anticorps monoclonaux, en attente d'une autorisation de mise sur le marché de l'Agence européenne du médicament, ne sont pas encore disponibles chez nous.
"Le dernier congrès sur la maladie d'Alzheimer, à Boston, a montré que plusieurs molécules arrivaient sur le marché. C'est une révolution, les gériatres et les neurologues ont enfin quelque chose à proposer aux patients. Les Etats-Unis n'ont pas hésité à se lancer dans ces nouvelles thérapeutiques, y compris pour des formes précoces de la maladie. En Europe, nous sommes sur une approche différente, multimodale, où on cherche à agir sur le mode de vie des individus", explique le Professeur Sandrine Andrieu, chercheuse Inserm en épidémiologie au service de santé publique du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Toulouse et au sein de l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) HealthAge.
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Aller plus loin que les constatations cliniques
Mais en quoi des mesures d'équilibre alimentaire, d'exercice physique et cognitifs sont-elles bénéfiques ? "Nous avons voulu aller au-delà des constatations cliniques et regarder les effets d'une intervention multimodale sur les biomarqueurs de la maladie. Et nous sommes les premiers à publier sur cet aspect", souligne le Pr Sandrine Andrieu. Ses travaux, menés avec Nicola Coley, ont été publiés dans la revue The Lancet Healthy Longevity.
"À partir de la cohorte de l'essai MAPT, constituée de 1680 personnes de plus de 70 ans avec un problème de mémoire, nous avons voulu étudier les effets d'une intervention multimodale (nutrition, exercice physique, exercices cognitifs) sur un des marqueurs sanguins de la maladie d'Alzheimer retrouvé chez 500 volontaires. Mais, malheureusement, alors que nous pensions observer des bénéfices sur un des marqueurs, nous n'avons pas vu de différence entre le groupe qui bénéficiait de ces interventions et le groupe contrôle. Cela ne veut pas dire que ces actions n'ont pas d'effet, elles agissent peut-être sur d'autres marqueurs comme l'inflammation, le système vasculaire", complète Nicola Coley, première autrice de l'étude.
Mieux comprendre la maladie, au-delà de la problématique de la mémoire
Pour l'épidémiologiste et chercheuse Sandrine Andrieu, la recherche sur la maladie d'Alzheimer entre dans une nouvelle ère, grâce à l'utilisation des biomarqueurs sanguins. "C'est nouveau. Cet outil permettra de mener des essais plus homogènes, permettant de sélectionner plus facilement des patients dans l'ensemble de la population, sans la difficulté des ponctions lombaires et du TEP scan. Toute l'épidémiologie de la maladie d'Alzheimer va changer, on arrivera peut-être à identifier de nouveaux facteurs de risques. Les chercheurs ont besoin de mieux comprendre la maladie, dans sa composante pure mais aussi dans ses impacts sur le système vasculaire et inflammatoire", ajoute-t-elle.
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Une autre équipe a également publié sur le même thème dans le JAMA (Journal of the American Medical Association), indiquant que les interventions multimodales ne modifient pas les facteurs biologiques de la maladie mais plutôt son environnement biologique et les facteurs associés (inflammation, processus vasculaire...). "Cela conforte nos travaux. La maladie d'Alzheimer se manifeste rarement sous le seul angle de la mémoire, l'intervention sur le style de vie joue sur autre chose", complète le Pr Sandrine Andrieu.
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