VIDEO. Après la révolte agricole, le retour à la ferme vu par un éleveur gersois, entre optimisme et réalisme
Michel Saint-Martin, agriculteur et éleveur de volailles à Dému dans le Gers, faisait partie des personnes présentes sur le barrage de sa commune au mois de janvier. Rencontre.
Éleveur de volailles à Dému, Michel Saint-Martin ne milite chez aucun syndicat agricole. Mais il était présent sur le barrage de sa commune à la fin du mois de janvier. Et même si les barrages ont été progressivement levés depuis les annonces de Matignon, le Gersois se veut moins catégorique quant à la fin des mobilisations : "Je pense que les actions vont continuer. On aura des barrages plus ciblés et qui dureront moins longtemps. On bloquera peut-être les centrales d'achat ou les supermarchés."
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Selon lui, les réponses du gouvernement sont insuffisantes : "On a eu quelques promesses... mais ce ne sont que des promesses."
De la cuisine à la ferme
Michel a grandi dans une famille d'agriculteurs : "Je n'ai pas gardé un excellent souvenir du métier. Mes parents travaillaient tout le temps, 7 jours sur 7. C'était dur. La moindre facture dans la boîte aux lettres était toujours compliquée à régler".
C'est donc vers les fourneaux que ce passionné de cuisine décide de se diriger. Et il y passera 20 ans de sa vie : "J'aimais cuisiner et faire de la pâtisserie. J’ai d’abord été dans des "gastros", puis dans des collèges du Gers".
Pourtant, il y a 10 ans, le chef décide de revenir vers le milieu qui l'a vu grandir : l'agriculture. Les éléments déclencheurs de ce virage professionnel ont été "les bons produits" : "Avec de bons produits, on a de bons plats, avec de mauvais produits, c'est plus compliqué... J'ai voulu produire moi-même de bons produits."
Il reprend alors l'élevage de son beau-père, en misant sur le circuit court : "Lui, il vendait la plupart de ses volailles à des coopératives. Quand j'ai repris la ferme, j'ai voulu vendre mes volailles à des particuliers, pour qu'ils trouvent des produits qu'on ne trouve pas dans les grandes surfaces."
"C'est un combat pour sauver son exploitation"
Depuis son installation, et mis à part les épisodes de grippe aviaire, les affaires marchent parfaitement pour Michel : "Depuis que j'ai arrêté la coopérative, mes conditions de travail sont meilleures car j'élève un volume moins important. En plus, les poulets que je vends sont mieux rémunérés."
Mais malgré tout, l'éleveur de 50 ans était donc présent sur le barrage agricole de Dému. Une présence qu'il juge évidente : "Même si ça se passe bien pour moi, je me sens concerné. Dans mon âme, ce métier d'agriculteur, je le connais."
Et Michel sait également tous les problèmes qui accompagnent quotidiennement ses collègues : "Ce monde agricole, que je côtoie depuis que je suis né, est extrêmement difficile. Certains travaillent jusqu'à 7 jours par semaine. Quand vous êtes employé, ça n'arrive jamais. Donc cette mobilisation, c'est un combat pour sauver son exploitation, pour être rémunéré correctement et pour pouvoir en vivre dignement."
"Ces barrages ont permis de créer des liens"
Partout en France, le mélange des cris de colère et de désespoir des agriculteurs a permis de donner naissance à des liens forts : "Ces barrages ont permis de créer des liens. On s'est revu un soir alors que les barrages étaient levés, raconte Michel. La plupart ont dit : la semaine prochaine, on sera en dépression de ne pas se voir".
Après des semaines de lutte collective, le retour à la "solitude dans nos fermes", sans solution pérenne pour assurer un revenu décent, est finalement ce que l'éleveur craint le plus pour ces collègues. Dans le Gers comme ailleurs dans l'Hexagone .
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