Toulouse : voici les quartiers où les parents préfèrent scolariser leurs enfants dans le privé
La Fédération des conseils de parents d'élèves de la Haute-Garonne (FCPE 31) publie une enquête sur la ségrégation scolaire présentée comme un "poison pour la République". À Toulouse, les stratégies d'évitement de certains collèges publics au profit du privé n'ont pas disparu pour les familles aisées, bien au contraire.
Le choix de la ministre de l'Education nationale, de la jeunesse, des sports et des Jeux olympiques et paralympiques Amélie Oudéa-Castéra, sous le feu des critiques, de scolariser ses enfants dans l'enseignement privé catholique (Stanislas) n'est pas nouveau pour de nombreuses familles aisées. La ville de Toulouse n'échappe pas à cette tendance qui, chaque année, se traduit par ce qu'on nomme la stratégie d'évitement. C'est-à-dire inscrire son enfant dans un collège bien noté, public ou privé, qui n'est pas de son secteur, en fournissant une fausse adresse, voire l'adresse de son lieu de travail, celle d'un parent. En sachant qu'au final, c'est l'inspection d'académie qui valide les demandes de dérogation.
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La stratégie d'évitement
Dans le centre-ville de Toulouse, où les collèges dits "favorisés" sont les plus en vue, les écoles élémentaires font chaque année face à cet évitement qui n'a jamais "été aussi fort", note la Fédération des conseils de parents d'élèves de la Haute-Garonne (FCPE 31) qui publie une étude instructive sur la ségrégation scolaire. Avant de lancer son programme de mixité sociale dans les collèges, le conseil départemental relevait avant 2017 que l'évitement de la carte scolaire représentait "un élève sur deux".
Saluant l'initiative du Département sur la mixité scolaire, la FCPE 31 est formelle : "les résultats observés sont probants : les compositions des collèges publics se sont nettement harmonisées. Mais ce que nous disent également les chiffres aujourd'hui, c'est qu'en réaction, la fuite vers les collèges privés des familles les plus favorisées n'a jamais été aussi forte". Le conseil départemental a en effet dépensé 56 millions d'euros pour la mixité sociale qui concerne 1 600 élèves issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville, notamment Reynerie et Bellefontaine. Environ 70% des élèves concernés ont obtenu leur diplôme national du brevet.
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De fortes disparités entre les collèges de Toulouse et du département
La FCPE 31 observe, au demeurant, d'importantes disparités entre les "zones transparentes", qui correspondent aux collèges du département hors métropole et leur taux d'indice de position sociale (IPS), et la "zone urbaine" où les établissements du secondaire accueillent des élèves plus défavorisés que leur secteur. En zone urbaine, la FCPE note "des pertes d’IPS de plus de 10 points, ou entre 5 et 10 points. On constate que les zones touchées par ce phénomène de ghettoïsation sont celles où un collège privé est implanté dans le secteur ou à sa proximité. Il s’agit donc essentiellement de Toulouse, mais aussi en dehors, comme à Muret, où le collège privé Joseph Niel a plus de 30 points d’IPS que son voisin Louisa Paulin (...) 16 collèges publics toulousains sur 24, donc 2 sur 3, ont un IPS inférieur à la moyenne nationale, ce qui est étonnant pour une ville pas spécialement pauvre".
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"La ségrégation à l'école n'est pas une fatalité"
Pour lutter contre la ségrégation scolaire, la FCPE 31 veut aller plus loin sur le terrain législatif. "L'expérience locale à Toulouse prouve une chose : la ségrégation à l'école n'est pas une fatalité, constate la Fédération. Les collectivités peuvent agir sur la sectorisation avec obtention de résultats, comme en Haute-Garonne. Il faut maintenant qu'elles y soient poussées par la loi. Cette loi devrait également encadrer les établissements privés : il n'est plus acceptable de subventionner la fuite des plus aisés vers le privé et la ségrégation ainsi créée, ou alors reconnaissons en cela une forme d'apartheid toléré et financé par l'Etat.
La FCPE 31 réclame une loi, "il est temps de réagir"
Pour lutter contre une "fuite vers le privé", décriée par la FCPE31, cette dernière demande aux législateurs de se pencher sur la question. "Il est temps de réagir, déclare la Fédération de parents d’élèves. Nous appelons nos députés et sénateurs de tous bords à s’atteler à la rédaction d’un texte législatif déclinant l’objectif de mixité apparu en 2013 dans le code de l’éducation, mais jamais mis en application. Nous comprenons la gêne qui sera probablement occasionnée chez beaucoup de nos parlementaires par les choix de scolarisation de leurs propres enfants dans des établissements souvent très favorisés. Nous formulons néanmoins le souhait que cela n’entrave pas leur volonté de mettre en place un système juste où les parents n’auront plus, comme eux, à trancher entre intérêt particulier et intérêt collectif".
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