Festival de Cannes 2022: un "Don Juan" soporifique face à un Cronenberg radoteur

  • Tahar Rahim et, dans l'ombre, Virginie Efira et Alain Chamfort.
    Tahar Rahim et, dans l'ombre, Virginie Efira et Alain Chamfort. Les films Pelléas - DR
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l'essentiel Deux films cannois sont dans les salles : "Don Juan", de Serge Bozon, et, à partir de mercredi, "Les crimes du futur", de David Cronenberg. Deux propositions aux antipodes qui déçoivent, l'un pour sa désespérante lenteur, l'autre par son côté "boucherie chic" malsain. 

Levons tout d’abord un malentendu : « Don Juan » n’est pas une comédie musicale, juste un drame amoureux dans lequel sont poussées quelques chansonnettes – pas terribles d’ailleurs. Serge Bozon y revisite le mythe de Don Juan, séducteur ici plus jeune que chez Molière ou Mozart mais tout aussi crépusculaire. Le beau gosse (Tahar Rahim) s’apprête à se marier. Sauf que la promise (Virginie Efira) lui fait faux bond au dernier moment. Ce qui le déstabilise profondément, lui qui n’a pas l’habitude de se prendre des vents. Don Juan est comédien. Il passe un moment au théâtre de Grandville, en Normandie, pour jouer...Don Juan. Et retrouve, au fil des rencontres, des femmes qui ressemblent beaucoup à sa dernière conquête et qui le repoussent toutes avec une énergique constance…

L’idée du film est judicieuse. Le fait de l’agrémenter de chansons aurait pu apporter quelque chose de vif. Las ! L’ensemble est d’une lenteur désespérante, comme freiné par on ne sait quel poids (peut-être celui de la culpabilité de Don Juan à l’égard de toutes les femmes qu’il a désespérées). Certes, ce personnage mythique est plus tragique que flamboyant. Ce n’est pas une raison pour en donner une version sans le moindre allant. Deux comédiens illuminent pourtant le film dès leur apparition. Virginie Efira, qui change de personnage sans cesse et ne cesse de captiver par son regard et par sa voix. Et – grande surprise – Alain Chamfort, acteur rare qui porte ici une douleur faite de tendresse pour un enfant perdu. Qu’il parle ou qu’il chante, il nous enchante.

La beauté intérieure au scalpel

Restant dans un registre qu’on lui connaît, à savoir le corps et ses mutations, David Cronenberg se complaît à cultiver un évident malaise avec « Les crimes du futur ». Dans un monde où la douleur a disparu, un homme produisant régulièrement de nouveaux organes (Viggo Mortensen) se donne en spectacle lors d’opérations publiques effectuées par sa compagne (Léa Seydoux). Et Cronenberg de multiplier les plans sur la beauté intérieure (littéralement) lors de soirées mondaines où le scalpel tranche à tout va. Scènes répugnantes agrémentées d’un discours « philosophique » vaseux. Sauf à prendre cet extrémisme au 15e degré, le spectateur a juste envie de crier : « Coupez ! »
 

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